mardi 21 décembre 2010

Combat pour la souveraineté alimentaire et la solidarité internationale















Le 3 décembre 2005 (peu avant la réunion ministérielle de l’Organisation Mondiale du Commerce à Hong-Kong), la Confédération Paysanne du Faso a fait preuve de maturité. Pour la première fois de son histoire la population de Ouagadougou a été témoin d'une marche, et d'un rassemblement de 2 500 paysans, venus des 45 provinces du pays, place de la Nation. Ils réclamaient la reconnaissance du droit de souveraineté alimentaire. Parmi eux, les femmes peules d’Hamdalaye (un quartier de Ouagadougou) sont sortie nombreuses avec de grandes calebasses sur lesquelles on pouvait lire « Cowbell n’est pas notre lait ! »

Par là, elles réagissaient à une campagne publicitaire en faveur du lait en poudre importé (Cowbell est une marque sud-africaine) qui disait, au contraire : « Cowbell, notre lait ». A cette occasion, j’ai pris quelques photos, dont la photo ci-contre. Et voici que l’unique vache de cette femme (une veuve) est morte il y a quelques jours. Elle n’avait que le lait que lui donnait sa vache pour vivre. Or je sais que cette photo a fait le tour du monde. Elle a même fait la couverture de plusieurs revue.
J’ai pensé qu’il était bon d’informer de la situation de cette femme tous ceux qui ont utilisé cette photo, ainsi que les lecteurs de cette lettre hebdomadaire. Nous sommes nombreux à nous battre pour que le droit à la Souveraineté alimentaire soit mondialement reconnu. Il est bon de savoir que parmi nous, il y a des femmes et des hommes qui ne sont même pas assurés du nécessaire. Cette femme en fait partie.
A l’occasion de la fête de Noël et de la nouvelle année, je me propose de servir d’intermédiaire entre cette veuve et ceux qui accepteraient de faire un don pour qu’ensemble nous puissions lui offrir une vache. Que tous ceux qui souhaiteraient manifester ainsi leur solidarité répondent à cette lettre, ils recevront les indications nécessaires pour que leurs dons parviennent rapidement à cette femme.
Si vos dons dépassent les besoins de cette femme, nous offrirons une vache à d’autres veuves d’Hamdalaye qui sont dans une situation semblable (elles sont au moins 6). Par la suite, s’il y avait un reliquat, je me propose de l’utiliser pour équiper une mini laiterie dans un quartier peul de l’intérieur du pays. Vous seriez informés.

Koudougou, le 16 décembre 2010
Maurice Oudet
Président du SEDELAN
Lettre abcBurkina n° 401 : sedelan@abcburkina.net

mardi 14 décembre 2010

A quoi sert l'indépendance quand on a faim ?

Manifestation des femmes productrices de lait juin 2007

11 décembre 2010 : Le Burkina Faso fête les 50 ans de son indépendance 50 ans sans véritable politique agricole et alimentaire, c'est long !
Ce samedi 11 décembre, le Burkina Faso est en fête : il fête ses 50 ans d'indépendance. Le Burkina est en fête, mais qu'en est-il des burkinabè ? Sans doute la ville de Bobo-Dioulasso est en fête, elle qui accueille les festivités de cet aniversaire. Mais qu'en est-il dans les villages ?
Mais la véritable question est celle que posait, il y a deux ans, M. Mahourou Kanazoe dans le quotidien burkinabè « Le Pays » en août 2008 : « A quoi sert l'indépendance quand on a faim ? »
L’auteur s’exprimait quand la crise de la vie chère était encore dans tous les esprits. Il écrivait : « Et voilà posée, dans toute sa cruauté, la question de la souveraineté alimentaire. Quelle fierté les Etats africains ont-ils à célébrer 48 ans (aujourd’hui, il s’agit des 50 ans ! - ndlr) d'indépendance quand ils ne sont pas en mesure de nourrir leurs populations ? … Il faudra recadrer les politiques agricoles, en rationalisant les stratégies et les moyens, au service des produits vivriers.»


De fait, le miracle n’a pas eu lieu. Les politiques agricoles n’ont pas été recadrées. La Confédération Paysanne, qui a fait 7 propositions à l’occasion de la vie chère, n’a pas été entendu. A mon sens, elles sont toujours valables. Aussi, nous les publions à nouveau. Au nombre de sept, elles se résument à un soutien consistant au secteur de l’agriculture et précisément aux producteurs.

1) L’accroissement de l’investissement dans le secteur agricole.
Au Burkina Faso, le niveau actuel d’investissement dans le secteur de l’agriculture doit être revu à la hausse et orienté vers les productions alimentaires. Nous parlons bien d’un investissement direct pour financer des activités agricoles au profit des producteurs et non des dépenses de fonctionnement des ministères en charge des questions agricoles.
2) L’accès aux intrants, aux équipements agricoles et aux produits vétérinaires.
Les intrants, les équipements agricoles et les produits vétérinaires sont des facteurs importants d’accroissement de la production agro-sylvo-pastorale. Or, au Burkina Faso, l’accès à ces facteurs traduit la grande souffrance des producteurs. Malgré certains avantages fiscaux accordés (concernant la subvention des tracteurs et motopompes), les intrants agricoles (engrais, semences, pesticides, produits zootechniques, etc.), les tracteurs et les motopompes ne sont pas à la portée des petits agriculteurs qui, jusque-là, ont produit 45% des richesses du pays. La facilitation de l’accès aux intrants doit commencer avec l’opération « 700 tracteurs » lancé par le gouvernement.
3) La baisse du taux d’intérêt du crédit agricole..
La disponibilité du crédit agricole s’entend par la baisse du taux d’intérêt qui est actuellement de deux chiffres, à un chiffre (7%) comme dans certains pays de la sous-région. Cette disponibilité passe également par la suppression de la TVA sur le crédit agricole et la mise en place de mécanismes adaptés à l’investissement agricole (conditions de garanties) et de penser à la garantie des risques liés aux activités de production et de commercialisation des produits agricoles.

4) Le rétablissement du système d’appui/conseil.
Le démantèlement du système d’appui/conseil intervenu à la faveur du Programme d’ajustement structurel (PAS) a été d’une grande fatalité pour les producteurs burkinabè. Abandonnés à eux seuls, les producteurs perdent progressivement leurs capacités, tâtonnent dans les systèmes de production et se butent finalement à la baisse de la productivité. Pour parer à cette éventualité, l’Etat doit réinventer un système d’appui/conseil aux producteurs essentiellement basé sur l’appui aux filières agricoles et en concertation avec les organisations paysannes et d’autres acteurs de terrain.
5) Accompagner franchement la commercialisation des produits agricoles.
Pour permettre à chaque producteur de maîtriser sa filière d’amont en aval et pour permettre aux consommateurs d’accéder en permanence à la nourriture, l’Etat doit s’impliquer dans la commercialisation en facilitant la mise en place de circuits de distribution, en instaurant un prix minimum garanti et en assurant une meilleure jonction entre la production et le marché. Cette solution paysanne est possible dans la mesure où elle rejoint les propos d’un haut responsable du FMI qui pense que la résorption de la crise actuelle passe en bonne partie par un interventionnisme étatique dans les différentes économies nationales.
6) La protection du marché des produits agricoles et la promotion de l’intégration régionale.
Depuis 2002 et dans un élan de visionnaire, la CPF a toujours signalé le danger d’ouvrir nos frontières à des produits agricoles subventionnés à l’exportation. Même compétitifs à court terme, nous assurions qu’à long terme, ces importations allaient mettre à rude épreuve la souveraineté alimentaire au Burkina et en général en Afrique de l’Ouest. L’histoire et la crise nous donnent raison et nous permettent de saisir une opportunité pour inviter le gouvernement à accorder non seulement la priorité à la production, à la transformation et à la consommation des produits locaux, mais aussi à mettre l’accent sur sa participation à la construction de l’intégration ouest-africaine. Espace par excellence de production agro-sylvo-pastorale et d’écosystèmes diversifiés, l’Afrique de l’Ouest dispose d’un marché qui, fondé sur les complémentarités écologiques, facilitera les échanges de produits agricoles entre les Etats et garantira surtout une sécurité alimentaire durable à 255 millions de consommateurs.
7) La méfiance à l’égard des agro-carburants.
A l’heure où les agro-carburants sont identifiés comme partie intégrante des causes de la vie chère dans le monde, on constate qu’une faction de Burkinabè manifeste un engouement à l’endroit du jatropha. Elle encourage les producteurs à cultiver massivement cette plante et pense qu’elle peut réduire la pauvreté. La CPF recommande à tous les producteurs de la prudence et propose qu’une étude d’impact des biocarburants sur les ménages ruraux et sur l’environnement soit commanditée. »

DAO Bassiaka
Et le président DAO Bassiaka de conclure : « En conclusion, les paysannes et paysans du Burkina tiennent et croient en ces mesures. Ils fondent l’espoir de les voir appliquer par l’Etat, les opérateurs économiques, les commerçants et les consommateurs. Elles sont incontournables pour assurer une souveraineté alimentaire au Burkina Faso où l’agriculture reste le principal moteur du développement. »


Le 16 octobre dernier, le ministre de l’agriculture, Laurent Sédégo, promettait « Très bientôt, nous ferons les états généraux de l’agriculture et de la sécurité alimentaire au Burkina Faso pour que l’ensemble des acteurs se donnent la main afin que nous puissions définir les voies et moyens pour atteindre très rapidement cette sécurité alimentaire ».
Nous attendons avec impatience ces « états généraux de l’agriculture et de l’alimentation . Avec la Confédération Paysanne du Faso, nous pensons que nous avons un besoin urgent « d’une véritable politique agricole et alimentaire » basée sur la pleine reconnaissance de la souveraineté alimentaire du Burkina Faso et de la CEDEAO.
Koudougou, le 11 décembre 2010
Maurice Oudet
Président du Sedelan

lundi 6 décembre 2010

Burkina Faso: Les producteurs de mangues se regroupent















Il s'est tenu le jeudi 11 novembre 2010 à Bobo-Dioulasso, une Assemblée générale (AG) constitutive pour la mise en place de l'Union nationale des producteurs de mangues du Burkina (UNPMB). Cette AG a connu la participation effective des différents acteurs de la filière mangue venus de cinq régions du Burkina. La cérémonie d'ouverture des travaux a été présidée par Pascal Benon, gouverneur de la région des Hauts-Bassins.
La production de la mangue était perçue jadis comme une activité de cueillette venant comme un appoint alimentaire. Aujourd'hui, on est à même de constater que la mangue occupe une bonne place dans les échanges commerciaux à travers les zones de production. C'est pour mieux organiser tout cela que s'est tenue à Bobo-Dioulasso le 11 novembre 2010 une assemblée générale (AG) avec pour objectif la mise en place d'une structure faîtière des producteurs de mangues.

Le gouverneur de la région des Hauts-Bassins, Pascal T. Benon, dans son mot d'ouverture, a félicité l'initiative des producteurs de mangues du Burkina de se doter d'un organe de représentation. Tout en remerciant le PAFASP (Programme d'appui aux filières agro-sylvo-pastorales), principal partenaire de l'UNPMB, le gouverneur a souhaité que cette organisation ne vienne pas seulement meubler le paysage institutionnel mais qu'elle soit le signe visible d'un engagement pour relever le défi de la production et l'exportation de la mangue.

Josias Zounzaola Dabire
Article tiré du Quotidien "Le pays" du 21 novembre

En cadeau, Peter Gabriel en hommage à Biko : Stephen Bantu Biko, dit Steve Biko, militant noir d'Afrique du Sud, une des grandes figures de la lutte anti-apartheid, est mort le 12 septembre 1977, à 31 ans, torturé et assassiné en prison.

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Des investisseurs saoudiens seraient prêts à prendre le contrôle de la production de riz au Sénégal et au Mali

La stratégie saoudienne visant à délocaliser la production alimentaire sera au cœur des discussions quand plusieurs chefs d’État et des délégations de hauts responsables des pays africains arriveront à Riyad pour une conférence de l’investissement, le 4 décembre 2010. Dans certains de ces pays, des investisseurs saoudiens acquièrent déjà des terres agricoles et commencent à mettre oeuvre la politique du Royaume. Les terres rizicoles d’Afrique de l’Ouest sont l’une de leurs cibles principales. De nouvelles informations obtenues par GRAIN révèlent que les hommes d’affaires les plus puissants du Royaume sont en train de négocier des transactions, au Sénégal, au Mali et dans d’autres pays ; ces transactions leur assureraient le contrôle de plusieurs centaines de milliers d’hectares des terres à riz les plus fertiles de la région et la production serait exportée en Arabie Saoudite. Ces transactions ne peuvent qu e saper dangereusement la sécurité alimentaire de millions de paysans et d’éleveurs et détruire leurs moyens de subsistance. Tout ceci se concocte à huis clos avec les gouvernements africains, sans que les populations concernées ou le grand public soient mis au courant.
Vous pouvez accéder à ce nouveau À contre-courant en français ici: http://www.grain.org/articles/?id=74
La version anglaise est disponible ici: http://www.grain.org/articles/?id=75