mardi 23 février 2010

Rituels











Françoise Gründ, etnoscènologue, a écrit un nouvel ouvrage paru chez l'éditeur Glénat : "Rituels". Je l'ai entendu, lors d'une interview radio, et elle m'a permis d'éclaircir certaines pratiques découvertes à Sindou, relatives au fétichisme...

Journaliste et premier docteur en scénologie (c' est à dire la science des formes spectaculaires) de France, Françoise Gründ a aussi été directrice du Festival des Arts Traditionnels ainsi que directrice artistique durant dix-huit ans de la Maison des Cultures du Monde à Paris. Grande voyageuse depuis trente-cinq ans, elle est également l'auteure de différents ouvrages sur les formes spectaculaires que l'on peut trouver à travers le monde. Françoise Gründ consacre aujourd'hui son temps à l'écriture, la peinture et la scénographie.

La case aux fétiches dans un hameau de Sindou, l'apparition des masques à l'occasion de certains événements, notamment la mort d'une personne, les danses, les pierres rassemblées en un endroit...toutes ces expressions qui nous laissent perplexes répondent à des rituels dont Françoise Gründ nous dit qu'essentiellement ils fortifient le lien social.





















Le rituel est une négociation avec les dieux, les forces face auxquels on se sent faible, on a peur. Le rituel est un engagement pour conjurer la peur et continuer à vivre. Les formes et les défenses varient d'un pays à l'autre mais on rencontre partout dans le monde des pratiques rituelles, formes spectaculaires humaines qui répondent à quelques grandes questions relatives à la mort, à la souffrance, à la faim, à la sexologie et au travail...
En occident, le mot rituel fait peur, on l'associe à la magie, à la thérapie mais les rituels existent hors du besoin de guérir. Interrogeons nos rituels, comme l'exode saisonnier dès les beaux jours, à quoi correspondent-ils..."On a perdu la béance, une disponibilité à l'ailleurs, à l'incompréhensible, on a perdu le sens de la magnifiscence et du merveilleux".








lundi 8 février 2010

Pierre RABHI au Burkina Faso

J'ai pensé qu'il était honnête que je vous fasse connaitre deux sources de réflexion et de travail importantes pour moi (avec La Via Campesina et ATTAC !), il s'agit des articles du SEDELAN et des textes de Pierre RABHI.
Le SEDELAN, Service d'édition en langues nationales du Burkina Faso est installé dans les bâtiments de la Communauté des Missionnaires d'Afrique à Koudougou... Les objectifs du SEDELAN ne sont pas figés, mais cherchent avant tout à répondre aux besoins du monde rural et des organisations paysannes du Burkina Faso.
Voici l'adresse de leur site internet : http://www.abcburkina.net/ où vous pouvez retrouver cet article.

Pierre Rabhi, reconnu mondialement pour son action en faveur de l’agroécologie a séjourné au Burkina Faso début février. L'interview a été réalisée par Lassina Fabrice SANOU, journaliste dans le journal "Le Pays".Le Pays" : Quel est l’objet de votre visite ici au Burkina ?
Pierre Rabhi : J’ai travaillé longtemps au Burkina Faso, depuis 1981. J’ai été le responsable du centre de formation en agroécologie de Gorom-Gorom. Je reviens pour voir avec mes partenaires comment nous allons encore poursuivre. En fait, j’ai moi-même ma propre ferme en France. Je venais ici en mission, dans le cadre du Centre de relation internationale entre agriculteurs pour le développement (CRIAD). Depuis 1981, je venais donc pour promouvoir l’agroécologie ici, en même temps que je continuais à gérer ma propre ferme en France. Je suis venu toujours pour l’agroécologie puisqu’on est en train de faire percevoir que la famine augmente, qu’il y a les changements climatiques, qu’il y a des problèmes d’engrais, parce que l’engrais coûte de plus en plus cher et qu’aujourd’hui il y a beaucoup de populations dites du tiers-monde qui sont confrontées au problème de "quelle agriculture pour le monde d’aujourd’hui ?" ; surtout quand on est dans des zones sahéliennes comme ici, qui ont subi des sécheresses, des changements climatiques importants. Il faut savoir que dans les années 70, il y a eu un énorme changement climatique par la sécheresse. Alors, finalement, entre la sécheresse, la cherté des engrais et leurs effets nocifs sur le milieu, il faut trouver une voie. La seule voie possible aujourd’hui, qui est reconnue mondialement, est l’agroécologie.
Au juste, de façon plus détaillée, qu’est-ce que l’agroécologie ?
Dans "agroécologie", il y a "agro" et "écologie". L’agriculture moderne est fondée sur les engrais chimiques, les pesticides, les semences sélectionnées. J’ai été témoin des effets catastrophiques de l’agriculture chimique sur le sol, la pollution de l’eau, la disparition en grande partie de la biodiversité domestique. J’ai donc choisi moi-même de gérer ma propre ferme en agroécologie. Les gens ne savaient pas trop ce que c’était. Sauf que nous avons démontré que l’agroécologie, même dans des sols arides, est la meilleure réponse qui soit, par rapport à toute autre méthode. Ici, les sols sont arides. L’aridité fait qu’il y a un ensoleillement très fort. Cet ensoleillement très fort stérilise les sols, c’est-à-dire qu’il les fait chauffer. Ce qui fait disparaître les microbes qui sont indispensables à leur fonctionnement. Pour nous, un sol, c’est vivant. C’est plein de microbes, de vers de terre, d’insectes, etc. C’est comme un estomac qui travaille. Et dans ce sol, quand on met des graines, les substances sont élaborées par ce sol. Si le sol ne reçoit pas ce qui lui est nécessaire pour élaborer ces substances, il a donc un métabolisme affaibli. L’un des éléments qui est absolument indispensable à la vie du sol, c’est l’humus. Les sols d’ici sont en même temps arides et dénudés.
Quand la pluie tombe, elle érode le sol, l’eau s’en va en emportant la terre. Il y a donc un énorme problème parce qu’on perd à la fois l’eau et les terres. L’agroécologie consiste à nourrir le sol et à le fertiliser avec des matières organiques élaborées. On prend ces matières organiques, les fumiers, les pailles, etc. et on les fait passer par un protocole de fermentation, en les mettant en tas et en les humectant. Dans un processus biologique, on va produire de l’humus, au bout de deux mois. Et l’humus a plusieurs avantages. D’un côté, il y a un avantage physique. Quand il s’agit de sols qui sont trop sablonneux, qui n’ont pas de corps, par exemple, ça donne du corps. Quand il s’agit de sols trop durs, avec beaucoup d’argile, ça ameublit le sol. L’humus a la capacité de retenir jusqu’à cinq fois son propre poids en eau. Quelques fois des compostes retiennent jusqu’à dix fois leur poids en eau. Pour lutter contre la sécheresse, c’est idéal.

http://www.abcburkina.net/images/









Par ailleurs, il y a tous les nutriments qui sont nécessaires à la plante. Il y a aussi des bactéries. Les bactéries sont spécialement importantes. Le composte qui est réalisé, c’est une levure et elle a infesté, positivement, le sol de ses microbes. Ces microbes vont se mettre au travail et vont revitaliser le sol. L’agroécologie intervient pour régénérer le milieu. Il y a la gestion des eaux pluviales à travers des techniques de lutte contre l’érosion, de récupération de l’eau dans les sols. Par ailleurs, il faut introduire le reboisement. L’arbre est extrêmement important pour plusieurs raisons. L’agroécologie, c’est tout cela ainsi que la sauvegarde des semences. On a perdu énormément de semences traditionnelles, au profit des semences adaptées. Mais il faut tout faire pour récupérer les semences traditionnelles. L’agroécologie c’est aussi une philosophie. C’est ainsi qu’on revient à l’amour de la terre. On aime la terre qui nous nourrit. On la soigne parce qu’on l’aime et en la soignant, elle nous nourrit.
A vous entendre, vous ne devez pas aimer les OGM !
Je suis ouvertement contre les OGM parce que c’est ce qu’on appelle des chimères. Jamais la nature n’a mélangé les espèces de cette façon, je veux dire à partir des gênes. Pendant longtemps on a croisé les plantes, mais on a jamais touché aux gênes. Les OGM c’est aussi les Organismes génétiquement modifiés et brevetés. Ce qui fait que les peuples ne pourront plus accéder à ces semences sans payer. On sait que les pays dits en développement ont déjà beaucoup de difficultés et c’est pour cela que nous nous sommes opposés aux OGM, parce qu’ils rendent dépendants. Ce sont des transinternationaux qui font des bénéfices sur tout ça et ça supprime la liberté et l’autonomie des peuples.


Etes-vous satisfait des conclusions du sommet de Copenhague ?
Pas du tout. Je suis considéré aujourd’hui comme la troisième personnalité en matière d’écologie en France. Je n’ai jamais cru que pendant ces sommets on puisse aborder véritablement les questions d’écologie. Il y a trop d’intérêts financiers. Le sommet a été un fiasco parce que derrière tout ça il y a beaucoup plus d’intérêts financiers que d’intérêts pour la nature et pour les êtres humains.
Que pensez-vous des politiques africaines en matière d’agriculture ?
La question alimentaire va devenir de plus en plus grave parce qu’il y a des sociétés internationales qui se sont arrangées pour confisquer à l’humanité sa capacité à survivre par elle-même. Aujourd’hui, il faut rendre hommage à la paysannerie, s’occuper d’elle et participer à sa formation. Un pays qui ne se nourrit pas, ne peut pas être un pays libre. De même qu’un être humain qui ne se nourrit pas ne peut pas être un homme libre. Les pays peuvent être libres par leur paysannerie, à condition de s’en occuper vraiment, de la soutenir, de l’appuyer, de la promouvoir.
Parlez-nous de votre fondation que vous voulez mettre en place ici au Burkina.
Je suis venu pour mettre en place la Fondation Pierre Rabhi pour l’agroécologie, la sécurité et la salubrité alimentaires. J’entends par sécurité que, en termes quantitatifs, il faut que les pays puissent nourrir leurs enfants et préparer les générations futures à être de futurs citoyens. Il y a aussi la question de la salubrité, c’est-à-dire que la nourriture aujourd’hui véhicule des nuisances qui sont très préjudiciables à la santé publique. On met énormément de substances chimiques et j’ai beaucoup d’amis scientifiques qui, maintenant, mettent en évidence le fait que l’alimentation détruit la santé physique quand elle véhicule des substances toxiques. J’ai l’habitude de dire que bientôt, quand on s’invitera à manger, il faudra se souhaiter bonne chance, parce qu’en fait toute l’alimentation aujourd’hui peut véhiculer des maladies. On sent la montée des cancers, des maladies du sang, même des maladies du cerveau qui sont dues à une alimentation qui véhicule des nuisances. Donc, pour ce qui concerne l’agroécologie, c’est produire en quantité, mais aussi en qualité. La nourriture doit être notre remède. Le paysan doit venir avant le médecin. Si on est bien nourri, une grande partie des pathologies disparaît.Propos recueillis par Lassina Fabrice SANOU

mardi 2 février 2010

OMC et agriculture, accord bloqué
















A l'OMC (organisation mondiale du commerce), le principe général des négociations est celui de l'engagement unique : aucun accord n'est trouvé tant que les Etats ne sont pas d'accord sur tout. Historiquement, deux dossiers ont contribué à bloquer un accord général, l'agriculture et l'accès aux non agricoles dit "NAMA" en anglais.
Si pour l'OCDE (organisation de coopération et de Développement économiques) , l'activité agricole ne représente plus que quelques points de PIB, pour de nombreux pays de la planète, elle est l'activité essentiel-
le, voire primordiale, dont dépend directement la majeure partie de la population, tandis qu'elle conditionne l'alimentation de toute la population des villes. Le Burkina Faso est dans cette situation où les prix bas du riz, du maïs et du coton importés ont pour origine les subven-
tions agricoles des grandes puissances à l'exportation...
Les petits et moyens Etats ont bien du mal à contrer la volonté des grands acteurs, et rien de nouveau n'est sur la table. Pire, dans l'état actuel des pourparlers, le risque est de voir le multilatéralisme dont se flatte l'OMC se transformer en une succession de négociations bilatérales, ce qui oterait toute possibilité de coalition aux petits et moyens Etats...
(source : le bulletin n° 79 de "Lignes d'ATTAC", bulletin de l'association pour une taxation des transactions financières et pour l'action citoyenne).





Par ailleurs,l'activité agricole au Burkina Faso, dont les cultures vivrières, souffre aussi des stratégies des intermédiaires grossistes qui obligent les agriculteurs à vendre à des prix de plus en plus bas. Ainsi, plus d'une décennie après son lancement officiel, la filière de la noix de cajou (fruit de l'anacardier, l'anacarde est notamment cultivé par des paysans de la région de Sindou et Banfora) n'est pas parvenue à tracer sa voie. Les performances réalisées sont vite confrontées à la baisse vertigineuse du prix de la noix sur le marché. De 300 F kg en 2002, le prix du kilo de la noix brute est tombé en 2006 à moins de 100F (il s'agit de prix bord champ). Tandis que la production croît d'année en année, ce sont les acheteurs qui imposent leur prix aux paysans. Ces paysans pratiquent une polyculture avec des méthodes et surtout des outils traditionnels mais qui évoluent et peuvent donner des bons rendements, sans avoir recours aux engrais chimiques et pesticides...ainsi, le fumier des poules, quand elles sont élévées en poulailler (ce qui est nouveau à Sindou mais qui est en progression dans le pays), est un fertilisant utilisé par la jeune génération d'agriculteurs. Ces nouveaux modes de culture et d'élevage (comme la fosse à fumure et le zaï) sont introduits par des agronomes burkinabés, accompagnés ou pas par des ONG.